Dans l’article précédent https://aufildutao.fr/plateau-apprentissage-en-tai-chi-chuan-premiere-partie/, nous avons commencé l’exploration des trois premiers niveaux du Tai Chi Chuan tels que nous l’entendons actuellement dans notre école Au fil du Tao.
En résumé, le premier plateau souligne l’importance de la détente, la souplesse et la conscience de corps. Le second plateau met l’accent sur l’enracinement et l’équilibre. C’est seulement à partir du troisième plateau que commence l’apprentissage des techniques avec la pratique du Grand Enchainement.
Nous allons examiner maintenant le contenu des plateaux suivants.
Le quatrième plateau : la pratique à deux
Le grand enchaînement est le principal outil de la pratique solo du Tai Chi Chuan. Sa pratique régulière permet au pratiquant d’intégrer non seulement les techniques, les postures, mais également la fluidité, l’enracinement, l’équilibre et la présence.
Concernant la Santé, il s’avère complet.
Cependant, le Tai Chi Chuan ne saurait pas se contenter d’une pratique individuelle. Ainsi, le Tuishou donne accès à la possibilité d’échanger des techniques complexes à deux.
D’une immense richesse quand on en comprend les clés, ce niveau est souvent vécu par les élèves comme un plafond exigeant. Signalons quelques éléments de compréhension :
- Rester constamment en contact avec les mains du partenaire. Or, se laisser toucher par une autre personne est complexe pour la plupart d’entre nous.
- Rester détendu, souple tout en subissant des poussées ;
- Passer des techniques permettant de neutraliser en douceur. Dans la forme individuelle, il est facile de croire que nous maitrisons la technique. La passer avec un partenaire est autrement délicat.
La pratique à deux est donc matérialisée en Tai Chi Chuan par le Tuishou. Nous y retrouvons tous les éléments des niveaux précédents.
Ce plateau peut se résumer de la manière suivante : pratiquer le Tai Chi Chuan à deux comme si nous pratiquions seuls : ne pas ressentir le partenaire comme un adversaire, mais à contrario une partie de nous-même : la notion d’altérité fait place à celle de l’unité.
Le cinquième plateau : les applications martiales
Les niveaux précédents ont établi progressivement les conditions de la pratique individuelle puis de la pratique à deux. Cependant, jusqu’à cette étape, le pratiquant n’a pas franchi le seuil des applications martiales.
Passer des techniques du Tuishou à des applications martiales soulèvent plusieurs exigences.
Ainsi, les techniques présentes dans la forme en l’état ne sauraient pas être utilisées dans un combat réel. De manière évidente, il manque :
- Le sens de la distance : être en mesure d’évaluer comment se déplacer lors d’une défense ou attaque. Cela inclut non seulement des déplacements en ligne droite, mais également sur les côtés.
- Le timing : être apte à réagir dans le tempo approprié. Par exemple : travailler les réflexes pour faire surgir la technique sans y réfléchir.
- La connaissance des points de fragilité (points vitaux) ;
- La capacité de protéger ses propres points de faiblesse ;
- La compétence technique en :
- Qin Na : luxation, saisie.
- Projection : déséquilibrer l’adversaire
- Frappes poings/pieds
- La puissance dans les techniques : l’émission de la force interne (Fa Jin) demande un entrainement spécifique.
Ce niveau possède ses propres outils auxquels un pratiquant peut s’entrainer une fois acquis les premiers plateaux.
Afin de faciliter l’apprentissage du sens de la distance, des angles et des techniques appropriées, notre école possède une forme de combat dite Sanshou. Il s’agit d’un enchaînement à deux entièrement différent du Grand Enchainement.
Les Qin Na sont répandues dans la plupart des écoles de kung-fu. Le Tai Chi Chuan possède sa propre manière d’utiliser ces techniques à travers notamment le Tuishou.
Ce niveau peut se résumer de la manière suivante :
- pouvoir réaliser les techniques dans le bon timing en y incluant la puissance
- Être en mesure de saisir, immobiliser ou luxer, projeter.
Le sixième plateau : le combat libre
Croire que maitriser les techniques suffit pour l’entrainement d’un bon combattant est une illusion.
Un entrainement aussi psychologique que physique est indispensable afin de pouvoir prétendre se défendre efficacement contre une agression.
La plupart des techniques de self-défense intégrées par les soldats, les forces de l’ordre, ne sont pas d’un haut niveau technique.
En réalité, leur formation est d’un autre ordre : il est préférable de posséder peu de techniques, mais de savoir les utiliser efficacement sans une once d’hésitation dans une situation conflictuelle.
Notre école n’a pas pour but de former des personnes aux techniques de self-défense.
Nous n’en parlerons donc pas dans cet article.
La pratique des armes
La pratique à mains nues est bien évidemment déjà très complète avec l’ensemble des outils vus précédemment.
Cependant, comme tout art martial, le Tai Chi Chuan possède une pratique des armes de base : le sabre, l’épée et le bâton.
Utiliser une arme suppose que le pratiquant soit déjà familiarisé avec les bases du Tai Chi Chuan. En effet, l’intérêt est de pouvoir manipuler une arme avec les principes de l’art martial.
Cela implique que la même arme peut être travaillée de manière très différente selon l’art martial.
En Tai Chi Chuan, nous devons retrouver dans la manipulation des différentes armes :
- la fluidité, la souplesse dans la tenue ;
- l’enracinement dans le déplacement ;
- la coordination des jambes et des bras : la puissance vient des jambes, relayée par le bassin et transmise aux bras par le buste.
De plus, les qualités développées dans le Tuishou doivent se retrouver dans la pratique à deux en arme : savoir maitriser le coller/adhérer à l’arme du partenaire.
En général, le sabre est la première arme enseignée, car elle est la plus simple en termes de techniques, l’épée demeurant la plus complexe.
Il n’en reste pas moins que la capacité à la manier correctement requiert un nombre très important d’heures.
Cet article visait à partager ma compréhension des niveaux en Tai Chi Chuan.
Souvent, il règne une très grande confusion dans l’esprit du débutant. En effet, les médias ont tendance à propager des fausses idées sur les arts martiaux et en particulier sur les arts internes.
Il était crucial de souligner que le Tai Chi Chuan est un véritable art martial contenant toutes les techniques afférentes.
Cependant, l’aspect Santé a la priorité dans le passage des niveaux : savoir se détendre, régir son équilibre, respirer de manière calme et profonde constituent les premières phases indispensables.
Alors seulement, si l’élève en a le désir, il pourra acquérir des techniques martiales.
L’article suivant abordera les plateaux d’apprentissage du pratiquant.
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