Par REVEL Maximilien — Au fil du Tao
La concentration est l’un des éléments fondamentaux des arts martiaux. Comment ne pas se rappeler ce moment dans « Karaté Kid », où le maitre insuffle à son élève une seule consigne : Focus 1
Un pratiquant qui arrive à préserver son attention de toute distraction (intérieure ou extérieure) et qui sait la diriger dans son corps est déjà un pratiquant avancé.
Dans les disciplines internes, cela est si important que le seul véritable objectif des premières années de pratique est de faire prendre conscience à l’élève du pouvoir énorme qu’il possède en disciplinant son attention.
Pour arriver à cette prise de conscience, les arts martiaux traditionnels comme le Tai Chi Chuan possèdent des rituels déclenchant un état de pratique2.
Cela commence par le respect du lieu de pratique (dojo dans les arts martiaux japonais) et se poursuit par l’échauffement et le Qi-Gong.
Le lieu de pratique
Le lieu est le premier marqueur indiquant à l’élève qu’il devient un pratiquant et se doit de respecter les règles de la discipline qu’il a choisie d’exercer.
Le dojo 3représente un espace sacré : dès son entrée, le pratiquant se met en condition de se consacrer à sa pratique en coupant avec son Moi extérieur : son statut social, , sa vie extérieure ne doit pas s’exprimer ici. Anonyme parmi les autres pratiquants, il devient un pratiquant de sa discipline. C’est une des raisons qui justifie une tenue d’école.
Le Salut
En Tai Chi Chuan, le professeur et les élèves échangent un salut, ce qui indique le début du cours. Dès lors, les élèves respectent :
- le silence. Cela permet à tout le groupe de se concentrer ;
- les consignes données par le professeur.
Dans les arts martiaux japonais (karaté par exemple), le rituel est plus conséquent : le salut est une cérémonie ou les élèves saluent le maitre, le professeur et les pratiquants avancés. Cela se fait en début et en fin de cours.
La routine d’échauffement
En effectuant toujours la même routine d’échauffement, le pratiquant rentre dans un état connu par avance : l’habitude des mouvements crée une sensation de sécurité et de plaisir anticipé.
Il sait que son corps va se détendre, les tensions se dénouer. Malgré la fatigue éventuelle, les conditions de vie extérieures, il se concentre sur ce moment de plaisir. Progressivement, chaque partie du corps se voit sollicité et détendu. Le pratiquant rentre dans sa maison, son propre corps.
Le Qi-Gong de Tai Chi Chuan
Le Qi-Gong spécifique au Tai Chi Chuan poursuit le processus de concentration en insistant sur :
- l’enracinement
- la respiration
- le lien entre la pensée et le mouvement
Très facile à intégrer contrairement au Grand Enchaînement, il permet au pratiquant de continuer son processus de concentration sans que la complexité des mouvements vienne perturber son mental.
Il a donc la responsabilité de se relier à son corps avec des mouvements simples et cela rend d’autant plus précieux ce moment où il est seul avec lui-même.
La pratique de la Forme
Une fois l’état de pratique mis en place, la pratique de la Forme peut alors débuter.
Cette phase ne doit pas intervenir trop tôt dans le cours. Un certain délai est nécessaire afin que le pratiquant se détende et se relie à son corps, laissant provisoirement de côté sa vie extérieure (20 minutes sont au moins nécessaires à un débutant).
Une fois que cet état est enclenché, alors les mouvements plus complexes sont travaillés. C’est cette complexité qui fait perdurer l’état de pratique.
Le Tai Chi Chuan requiert une participation de tout le corps. Cela implique de coordonner les bras et les jambes au travail du Dan Tian, de mettre sa pensée dans le geste.
Seul un état de concentration suffisant permet de développer les mouvements en étant présent. Un élève insuffisamment préparé verra son ego l’emporter (pensées négatives, pas d’écoute des consignes). Ses gestes seront incorrects et son esprit ne sera pas relié à son corps.
Il m’est difficile de conclure cet article sans évoquer un élément essentiel :
Si le lieu est le premier rappel de concentration, la présence du groupe est bien sûr le second rappel.
Souvent, lorsque je donne le conseil de pratiquer chez soi, la réponse est unanime : « Ce n’est pas pareil quand on est seul ».
C’est dire l’importance du groupe dans la qualité de concentration : « je suis ici et maintenant avec mes camarades de pratique. Je les respecte et dois donc me comporter en tant que tel ».
Chez soi, il est extrêmement difficile de rester concentré, car les moyens de distraction ne manquent pas…
En acceptant de pratiquer avec un professeur et des camarades, le pratiquant est sans cesse rappelé à l’état de pratique. Il ne peut pas se disperser tant que dure la séance d’entraînement.
Le sujet est inépuisable tellement il est central. Ainsi, je souhaitais signaler dans cet article quelques éléments de compréhension dans la structure du cours de notre association.
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